S’il est un souvenir que l’on garde toute sa vie, en tant que pêcheur, c’est celui du premier leurre que l’on a envoyé dans l’eau. Dans mon cas, c’était un spinnerbait et il m’a permis de capturer le premier brochet de ma vie. Si ce leurre est particulièrement adapté aux débutants, il peut être bien plus technique qu’il n’y paraît. Selon moi, le spinner fait partie du matériel que tout pêcheur aux leurres doit avoir. A travers cet article, nous allons tenter de faire un tour d’horizon des grands principes d’utilisation du spinnerbait.
Table des matières
Un leurre passe-partout
Le spinnerbait naît aux Etats-Unis dans les années 50. A l’origine destiné à la pêche du black bass en milieu encombré, c’est un leurre compact qui émet beaucoup de vibrations, propose un beau volume et passe au travers des obstacles. Bois immergés, herbiers, nénuphars : le spinnerbait est fait pour passer là où vous n’oseriez jamais lancer un poisson nageur. De plus, sa taille en fait un leurre efficace sur tous les carnassiers. Black bass, brochet, perche, silure mais aussi sandre, le spinnerbait est universel. Certains sont miniaturisés pour la pêche de la truite : on les appelle microspinners.

Le spinnerbait est bâti à partir d’un rubber jig (on retrouve la tête plombée, la jupe et l’hameçon fort de fer) et d’une armature métallique, placée dans l’axe de l’hameçon, munie d’une ou plusieurs palettes.
C’est cette armature qui protège l’hameçon et guide le leurre au cœur des obstacles. Les palettes permettent de créer des signaux visuels et vibratoires qui déclenchent l’agressivité des poissons. La jupe ajoute du volume au leurre et cible l’attaque du carnassier.
Enfin la forme de la tête plombée permet la progression dans les obstacles et son poids fait varier la profondeur de nage.
Les palettes
Les palettes sont les éléments les plus importants sur ce type de leurre. Il en existe principalement trois formes : la feuille de saule (« willow-leaf »), l’Indiana et la Colorado.
La palette feuille de saule est caractérisée par sa forme allongée. Elle déplace peu d’eau donc émet un signal vibratoire faible. Cependant, elle émet beaucoup plus de signaux visuels que les palettes Colorado et Indiana. Un spinnerbait muni de ce type de palettes tire moins dans la canne et admet une profondeur de nage plus importante.
On l’utilise lorsqu’il faut pêcher creux ou vite et lorsqu’on veut jouer sur l’aspect visuel du leurre, c’est-à-dire lorsque l’eau est relativement claire. C’est le leurre qu’il faut utiliser pour dénicher des poissons camouflés dans les herbiers : ils ne sauront contenir leur agressivité à l’encontre de cette proie éblouissante qui passe à grande vitesse au-dessus d’eux. Les palettes argentées sont particulièrement efficaces par temps ensoleillé car les reflets agressent visuellement les poissons. Pour cela les palettes « martelées » produisent encore plus de flashs que les palettes lisses. La gamme de spinnerbaits proposés par la marque Fox Rage sont parfaits pour une telle utilisation.

A l’opposé, nous avons la palette Colorado. De forme ronde, elle émet énormément de vibrations mais peu de flashs lumineux. Il faut l’utiliser lorsque l’on veut pêcher à faible vitesse et déranger les poissons par la création de
grosses turbulences dans l’eau, lorsque le seul aspect visuel n’est plus suffisant, à savoir dans des eaux plus troubles.

Il est difficile de pêcher profondément avec ce genre de palettes car elles opposent une trop grande résistance dans l’eau lorsqu’on les ramène. Lorsque l’eau devient plus froide, un spinner muni d’une ou deux palettes Colorado devient une arme redoutable car on peut le ramener très lentement. Contrairement aux palettes feuilles de saule, la couleur est moins déterminante car on recherche plutôt des vibrations. La marque Sakura propose le Cajun spinnerbait qui est doté d’une ou deux palettes Colorado et d’un excellent rapport qualité-prix.

Quant à elle, la palette Indiana est plus allongée que la palette Colorado, c’est donc le parfait compromis entre signal vibratoire et visuel. Elle est donc bien adaptée pour une utilisation intermédiaire.
Il est très important de choisir des palettes qui rentrent rapidement en action, afin que le leurre soit pêchant le plus tôt possible car le spinnerbait est un leurre qui déclenche de très nombreuses touches réflexes.
Enfin, dans la grande majorité des cas, les spinnerbaits sont munis d’une ou deux palettes. Cela va principalement jouer sur les vibrations du leurre ainsi que la profondeur de nage. Il est tout à fait possible d’associer deux palettes différentes. Cependant, il ne faut pas hésiter à enlever ou bien changer une palette pour avoir une action de nage qui correspond mieux à la pêche du jour.
Le trailer
Parlons à présent d’un aspect très important de la pêche au spinnerbait : le trailer, à savoir le leurre souple que l’on va armer directement sur l’hameçon du leurre. Cela augmente le volume du leurre, apporte une vibration supplémentaire et cible mieux l’attaque du poisson. Toutefois, il est possible de pêcher sans trailer, notamment pour viser les perches.
Il existe deux manières de monter le trailer sur le leurre. On peut le mettre de manière classique comme un leurre souple sur une tête plombée ou bien simplement le piquer par l’extrémité, à la manière de ce qui est fait sur un hameçon « dropshot ». Cette deuxième option va permettre d’apporter encore plus de liberté de mouvement au trailer.
On peut choisir son trailer en fonction de plusieurs paramètres : le volume ou bien la vibration supplémentaire mais aussi la vitesse de descente ou la profondeur de nage du leurre souhaitée.
Les leurres souples de type « shad » (One up shad – Sawamura) sont ceux qui vont apporter le plus de vibrations. Ils vont aussi permettre de ralentir la descente du leurre et de faire remonter le leurre dans la colonne d’eau lors de la récupération. Comme tous les autres types de leurres souples, ils vont aussi apporter du volume et un aspect visuel.
De manière générale, les « grubs » (X-layer curly – Megabass) permettent d’ajouter du volume et des vibrations plus fines que celles du shad. Cependant, ils joueront moins le rôle de parachute donc le leurre descendra plus vite dans la couche d’eau et pêchera donc plus creux.
Les leurres de type finesse (Shad impact – Keitech) et « worm » sont principalement utilisés pour ajouter du volume et un côté visuel au leurre. Leurs vibrations très subtiles sont minimes par rapport à celle des palettes.

Enfin, il est possible d’utiliser une imitation d’écrevisse (Crazy flapper – Keitech) en guise de trailer. C’est particulièrement intéressant lorsqu’on pêche lentement près du fond : les appendices du leurre souple se mettent en action pour rappeler au prédateur une écrevisse en mouvement.
Concernant la couleur, il est possible d’utiliser des trailers de même couleur que la jupe ou bien d’utiliser une couleur totalement différente afin de proposer un contraste : il faut essayer diverses combinaisons. Les couleurs de jupe sont variées et nombreuses. Il existe des coloris classiques qui fonctionnent très bien : Fire Tiger, chartreux, verdâtre, noir… D’autres sont moins conventionnels comme le rose par exemple mais sont très efficaces dans certaines conditions. A vous d’essayer pour trouver vos favoris et ceux qui correspondent le mieux aux milieux que vous pêcher.
Hameçon-chance ou non ?
Un hameçon-chance est un hameçon supplémentaire que l’on peut ajouter pour concrétiser les touches où le poisson attaque l’extrémité du trailer. Il est cependant possible de ne pas en utiliser : veillez en permanence à la cohérence entre la taille du spinner et celle du trailer, afin de ne pas surdimensionner ce dernier.
Pensez au noir !
La couleur noire est un peu à part. Elle fonctionne très bien dans des conditions de faibles luminosité mais aussi lorsque l’eau est très claire et que le temps est ensoleillé. Pêcher aux extrémités du jour avec un spinnerbait muni d’une ou deux palettes Colorado noirs avec une jupe noire et un trailer noir offre souvent de bons résultats. Ce genre d’association fonctionne aussi par forte luminosité car cela propose une silhouette bien distincte et effilée. La couleur noire est donc une valeur sûre bien que sous-utilisée.
Une canne et un moulinet adaptés
Un ensemble casting est à privilégier, principalement pour une raison de confort. Etant donné la présence d’un hameçon simple, fort de fer, il faudra être capable d’exécuter un ferrage puissant pour bien planté celui-ci. Cependant une action de canne trop raide serait délétère pour le confort de pêche et pour un ferrage dans le bon timing car vous auriez tendance à arracher le leurre de la bouche du carnassier si l’information de la touche vous parvient trop rapidement. Le meilleur compromis semble être une canne d’action regular–fast. La plage de puissance dépend du poids des leurres que vous souhaitez utiliser mais une 7-28g permet l’utilisation des spinnerbaits de grammages usuels.
Le moulinet se doit d’être polyvalent. Il doit tout aussi bien permettre d’extraire rapidement un poisson d’un arbre immergé que de pratiquer une récupération très lente. Un ratio intermédiaire (6.2:1) fera parfaitement l’affaire. Les critères de qualité du frein dépendent du poisson recherché mais n’oubliez pas que vous pouvez être amené à devoir abréger un combat en zone encombrée.
Pour le corps de ligne, le fluorocarbone est recommandé. Sa grande résistance à l’abrasion est primordiale car vous allez pêcher la plupart du temps dans les obstacles. Son élasticité améliorera votre confort. Au niveau de la résistance, le minimum est du 14 lbs. Inutile de pêcher plus finement si vous ne voulez pas vous faire couper au contact d’une branche par exemple. De plus, la plupart des touches sont des touches réflexes et dans ce cas, la discrétion importe peu. Lorsque vous pêchez spécifiquement le brochet, il est conseillé d’ajouter une pointe en fluorocarbone d’au moins 60/100 pour éviter que celui-ci ne reparte le leurre entre les dents.
Enfin, il est indispensable de nouer votre leurre. N’utilisez surtout pas d’agrafe : celle-ci va s’emmêler avec les palettes, rendant improductifs bon nombre de vos lancers. De plus cela permet de surveiller le bon état du bas de ligne, souvent mis à rude épreuve.
Le leurre polyvalent par excellence
Il existe diverses manières d’utiliser un spinnerbait. Il faut cependant retenir qu’un spinnerbait prend tout son sens lorsqu’il est au contact d’obstacles. De manière générale, il faut utiliser ce type de leurre lorsque l’eau est agitée par du vent ou bien du courant qui met les sédiments en suspension, ce qui provoque une activité du poisson fourrage. Il s’utilise majoritairement en zone peu profonde, contrairement à son cousin le chatterbait qui admet plus facilement des profondeurs plus importantes.

Il est d’abord envisageable de prospecter les bordures, bois immergés, pointes rocheuses en lançant au plus près de l’obstacle. Une récupération immédiate pourra décider un poisson réfugié à venir intercepter le leurre très rapidement, parfois juste après l’impact du leurre dans l’eau. Il faut donc garder un contrôle permanent sur le leurre. C’est souvent le fait d’aller taper dans les obstacles qui déclenche les touches car cela désaxe le leurre. Les touches sont alors souvent assez peu violentes car le poisson se saisit du leurre au moment où la ligne est légèrement détendue du fait de la collision avec l’obstacle : restez attentifs !
Si les poissons ne sont pas aptes à monter sur le leurre rapidement, il est possible de le laisser couler jusqu’au fond. Les palettes vont alors tournoyer dans toute la colonne d’eau, rappelant ainsi un hélicoptère. Pour obtenir au mieux ce genre d’action, un spinnerbait muni d’une ou deux palettes Colorado est idéal. On peut aussi choisir un trailer qui va ralentir la descente du leurre afin de laisser encore plus de temps au poisson pour déclencher son attaque. Pour cela, les « grubs » ou les « shads » sont des outils indispensables. Une fois arrivé au fond, on enclenche une récupération classique.
Le spinnerbait est aussi très bien adapté pour pêcher les herbiers. Un spinnerbait léger muni de palettes « willow-leaf » pourra être ramené à grande vitesse juste au-dessus des algues et ainsi provoquer l’agressivité des poissons carnassiers embusqués. Les espaces laissés libres entre deux touffes d’herbiers voisines sont souvent des bons endroits d’embuscade pour les prédateurs qui attendent le passage d’une proie. Il est aussi possible de pêcher au cœur des herbiers peu denses avec ce type de leurre afin d’aller déloger les carnassiers du cover.
Lorsqu’il est ramené rapidement, le spinnerbait reste très haut dans la colonne d’eau et les palettes frappent la surface, donnant ainsi une action de « buzzing ». C’est une technique particulièrement efficace pour pêcher les zones peu profondes ou les champs de nénuphars.
A l’inverse, il peut être utilisé le plus lentement possible, très proche du fond. On appelle cela le « slow-rolling ». Cela permet d’utiliser ce type de leurre même quand l’eau est calme et qu’on veut avoir une approche plus discrète. C’est une approche particulièrement efficace sur le brochet ou le sandre.
Enfin, n’oubliez jamais que le spinnerbait est le leurre tout-terrain par excellence. Vous pouvez vous en servir pour partir à la découverte de nouveaux spots, cela vous permettra d’appréhender rapidement l’encombrement du lieu. Lorsque vous l’utilisez pour « pêcher l’eau », il est possible de faire varier les vitesses de récupération au cours d’un même lancer voire d’imprimer quelques « twitchs » pour désaxer le leurre.
Je pense à présent avoir fait le tour des fondements indispensables pour débuter puis progresser dans la pêche au spinnerbait. Gardez en tête que ce leurre est un merveilleux outil qui peut s’avérer efficace dans de nombreuses situations et qu’il s’adresse aux pêcheurs de tout niveau. Il ne vous reste plus qu’à essayer par vous-même. A vos palettes !
Article rédigé par Baptiste Portet-Tixidor.
Du même auteur retrouvez également “Le crankbait un leurre idéal pour débuter”
Pour aller plus loin
Voici un lien vers la vidéo du Fishing Club au sujet du spinnerbait: